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La crise sanitaire montre la fragilité des biens communs essentiels et l’importance de nos comportements individuels et collectifs pour leur sauvegarde. Quelles leçons en tirer concernant l’Océan ?

On l’entend souvent répété : le monde d’après la crise ne sera pas celui d’avant. Mais lequel voulons-nous ?
Nous découvrons brutalement la fragilité d’un système de santé que nous croyions solide. N’en est-il pas de même pour d’autres « Biens Communs », civilisationnels ou naturels que nous tenons pour acquis ? Comme la liberté d’aller et venir, la sécurité sociale, un climat stable, une riche biodiversité, ou un océan généreux ?
Cette crise nous montre combien nous dépendons de ces biens communs. Son combat illustre comment, chacun, nous pouvons agir pour les préserver : comment nous avons une part de responsabilité et une formidable occasion d’engagement.
La grande leçon à en tirer, n’est-ce pas l’absolue nécessité d’identifier ces biens communs essentiels, et de les préserver coûte que coûte ?La mobilisation va permettre de venir à bout de la pandémie, au prix de nombreuses victimes, de grandes souffrances et lourdes difficultés. A l’urgence sanitaire va succéder l’urgence sociale, économique, sécuritaire, environnementale.Le confinement, les gestes barrières sont vécus par la plupart d’entre nous comme un engagement citoyen et une responsabilité individuelle : notre contribution à la lutte, en appui de ceux qui sont en première ligne. Les Etats, de leur côté, prennent des mesures économiques comme vis-à-vis des libertés, auparavant inimaginables.
Nous les acceptons face au danger immédiat, concret. Face aux crises moins immédiates, mobiliser reste difficile.Les scientifiques nous montrent comment la perte de biodiversité impacte la propagation de virus des animaux sauvage à l’homme, mettant une fois de plus en évidence le lien organique puissant qui unit l’Homme à son environnement. Faut-il d’autres bouleversements pour qu’enfin nous bougions ? Notre santé et celle de notre Planète ne sont-elles pas ensemble, notre plus grand bien commun ?Il nous faut, dans l’agenda du monde d’après, soigner notre terre et en particulier 70% de celle-ci : notre Océan, ce trésor en péril. Aujourd’hui, il émet la moitié de l’oxygène de notre planète, autant que l’ensemble des forêts. Il absorbe un tiers de l’oxyde de carbone que nous émettons. Ses poissons fournissent les protéines nécessaires à des milliards d’humains. Les grands courants qui le parcourent en surface où ils se réchauffent et dans les profondeurs où ils se refroidissent, régulent notre climat et il stocke 90% de la chaleur produite par nos activités. Sa biodiversité interagit avec l’air et la terre. Notre civilisation ne survivra pas à un effondrement des écosystèmes marins.

Développer la conscience des biens communs est complexe : c’est une évolution culturelle, où les changements de comportements individuels volontaires et volontaristes viennent appuyer la définition, la diffusion et l’assimilation de nouvelles règles communes. Engageons et conduisons ce renouveau.

Réchauffement, acidification, pollutions, déchets, surpêche, aquaculture intensive : comme dans la lutte contre la pandémie, tous les gestes comptent. Acceptons de nouvelles contraintes et ne soyons pas le passager clandestin, qui profite du système sans y contribuer ; le mouton, qui change ses habitudes seulement sous la pression sociale ; l’attentiste, qui sait la nécessité d’agir mais laisse aux autres les premiers efforts. Ne nous contentons pas d’applaudir. Inspirons-nous des actions vertueuses, de tous ceux qui prennent déjà soin de l’Océan.

La communauté maritime en compte bon nombre chez les scientifique, les associations, les institutions et, de plus en plus, dans le secteur économique. Elle montre sa volonté de poursuivre dans la tempête, d’y trouver même des opportunités de progrès, d’éco-innovations. Puisse sa solidarité aider les plus fragiles à traverser l’épreuve.

L’actualité nous le montre : nous pouvons vivre différemment, nous adapter profondément, changer nos habitudes. Par nos actes, poussons l’Etat, l’Europe, la communauté internationale à agir sans tarder : prenons notre part de responsabilité pour que l’Océan soit toujours notre bien commun. N’attendons pas : c’est notre choix du monde d’après.

Eudes Riblier
Président de l’Institut Français de la Mer
Co-initiateur de l’Appel pour l’Océan, Bien commun de l’Humanité : « oceanascommon.org »

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